Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/310

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Et il s’arrêta subitement, tout honteux du mot qu’il allait prononcer.

— Quoi ? demanda Julian.

— Rien !… fit-il avec découragement ; puis il ajouta tout à coup : C’est elle au contraire qui me déteste, puisqu’elle veut partir.

— Tu es un niais, dit Julian en haussant les épaules ; elle ne te déteste pas, bien loin de là. Comment, enfant que tu es, tu ne comprends pas que la pauvre fille t’aime ? que c’est pour cela qu’elle veut partir, parce qu’elle croit que tu ne peux pas la souffrir ?

— Oh ! cela ne sera pas ! ce ne peut être ! s’écria-t-il avec agitation, Tu dis qu’elle m’aime ? Tu en es sûr ?

— Pardieu ! cela est assez visible. Excepté toi, tout le monde s’en est aperçu depuis longtemps. La pauvre enfant !…

— Mais alors, pourquoi ?…

— Ah ! ça, s’écria Julian, en lui coupant brusquement la parole, supposes-tu, par hasard, qu’elle te l’avouera ! Tu es étrangement fat, mon camarade.

— Oh ! je ne supposerai jamais une chose aussi monstrueuse ; mais, je l’aime, moi ! je l’adore ! Voilà pourquoi tu me vois triste à en mourir ; je ne puis vivre sans elle, et supposant qu’elle ne m’aimerait pas, je… voilà pourquoi…

— Tu t’embrouilles, tu ne sais plus ce que tu dis ; il faut en finir et lui avouer ton amour.

— Je n’oserai jamais ! fit-il d’un air piteux.

— À d’autres ! puisque je t’affirme qu’elle t’aime.

Tu te trompes, mon ami, je suis un sauvage à peine dégrossi ; Mariette ne m’aimera jamais autant que je l’adore ; j’en mourrai, mais jamais je te le jure, je n’oserai lui avouer mon amour.

— C’est inutile maintenant, mon cher Bernard, dit tout à coup Denizà en sortant subitement d’un massif derrière lequel jusqu’à ce moment elle s’était tenue cachée.