Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/335

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Souvent il tournait la tête de leur côté et les examinait avec la plus sérieuse attention.

Plusieurs fois même, comme malgré lui, il avait fait un mouvement comme pour traverser la route et se rapprocher des deux jeunes gens.

Mais, chaque fois, il s’était arrêté et avait continué à suivre le côté de l’allée qu’il tenait, d’un air pensif.

Cependant, au moment où les jeunes gens allaient arriver au grand lac du bois de Boulogne, l’étranger se décida tout à coup.

Il traversa l’allée et mettant le chapeau à la main, il dit à Armand, avec une exquise politesse :

— Pardon, monsieur, un mot, s’il vous plaît ?

Armand se retourna, regarda l’inconnu, lui rendit son salut, et ralentissant l’allure de son cheval :

— Que désirez-vous, monsieur ? lui répondit-il.

— Monsieur, reprit l’étranger, je vous prie tout d’abord d’excuser la question singulière que je désire avoir l’honneur de vous adresser.

Le jeune homme examina plus attentivement l’étranger, qu’il ne l’avait fait encore, et il ne dissimula que difficilement le mouvement de répulsion pour ainsi dire instinctif que lui causait cet homme.

— À qui ai-je l’honneur de parler, monsieur ? répondit-il.

L’inconnu hésita pendant une seconde.

— Je ne crois pas, répondit-il enfin, que, pour que vous répondiez à la question que je désire vous adresser, il soit nécessaire, monsieur, que je vous dise qui je suis.

— Vous vous trompez, monsieur, répondit avec un peu de hauteur le jeune comte, je n’ai pas l’honneur de vous connaître ; vous-même m’avez averti que cette question sera singulière ; il est donc indispensable que je sache qui vous êtes, afin de savoir à qui m’en prendre le cas échéant où cette question me semblerait inconvenante.

— Mon Dieu, monsieur, ne vous fâchez pas, je vous prie, reprit l’inconnu avec une pointe d’ironie ; je désirais