Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/379

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— Il vaut mieux perdre une somme, si importante qu’elle soit, que risquer sa tête.

— Raisonnons froidement,

— Je ne demande pas mieux, ce que vous feignez de prendre pour un manque de courage n’est en réalité que de la prudence, et si vous voulez m’écouter pendant cinq minutes seulement, je me fais fort de vous le prouver.

— Eh bien, soit, parlez, je vous écoute ; mais soyez bref et surtout allez droit au but, vous savez que je n’aime pas les longs discours.

— Soyez tranquille, je n’abuserai pas de votre patience : nous ne sommes pas ici dans les grandes savanes américaines de l’Ouest lointain…

— Bon ! interrompit vivement le Mayor, arrêtez-vous, cher ami, vous n’avez pas besoin d’aller plus loin.

— Pourquoi cela !

— Parce que je sais ce que vous allez dire, pardieu ! Il ne faut pas être sorcier pour le deviner.

— Oh ! oh ! dit Felitz Oyandi avec incrédulité.

— C’est comme cela, cependant ; nous ne sommes pas au désert, où la loi du plus fort prime tout, où l’on jouit de la liberté, ou, si vous le préférez, de la licence la plus complète ; où l’on tue ou l’on est tué sans que personne s’en préoccupe, et où l’impunité est assurée d’avance à celui qui sait se faire craindre et s’imposer aux autres : non, nous sommes à Paris, au centre de la civilisation où la loi règne en maîtresse ; où le gouvernement dispose d’une police admirablement organisée, nombreuse et aguerrie ; où l’homme qui commet non pas un crime, mais seulement un simple délit, est aussitôt recherché, et, si habile qu’il soit et si riche qu’il puisse être, ne saurait parvenir à s’échapper, tant toutes les issues lui sont fermées… N’est-ce pas cela que vous vouliez me dire ?

— C’est cela, en effet, répondit Felitz Oyandi en baissant affirmativement la tête.

— Il y aurait beaucoup de choses à répondre sur l’organisation de cette police tant vantée et son habileté incomparable. Je pourrais vous prouver, par des chiffres