Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/378

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assigné ; il se moqua de moi et de ma tentative d’assassinat sur sa personne ; je niai, mais il ne fut pas ma dupe.

— De sorte ?…

— Que nous sommes à la merci de ce drôle, qui sans doute essaiera de nous faire chanter.

— Diable ! diable ! la situation n’est pas couleur de rose. Est-ce tout ?

— Trouvez-vous donc que ce ne soit pas assez ?

— Caraï ! je trouve que c’est beaucoup trop. Maintenant, écoutez-moi à votre tour : quand vous m’aurez entendu, vous aviserez à ce qu’il convient de faire dans les circonstances où nous nous trouvons ; car mon cas a une singulière ressemblance avec le vôtre, et peut-être est-ce le même individu qui, à quelques heures de distance, nous a craché nos noms à la figure.

— Comment ! s’écria Felitz Oyandi avec épouvante ; mais alors nous sommes perdus ! Il faut fuir au plus vite.

— Taisez-vous, trembleur, et écoutez-moi ; nous verrons ensuite quelles mesures nous devons prendre.

— Oui, c’est cela, parlez, parlez au plus vite !

Le Mayor haussa les épaules en souriant avec mépris, et, faisant tomber la cendre de son cigare, il raconta dans tous ses détails ce qui, le matin, s’était passé au bois de Boulogne.

— J’étais précisément venu chez vous, ajouta-t-il en terminant, pour vous mettre au courant de cette affaire, et vous demander conseil, ou plutôt m’entendre avec vous à propos de cette affaire. Voyons, qu’en pensez-vous ?

Felitz Oyandi avait écouté avec la plus sérieuse attention le récit du Mayor, les sourcils froncés et la pâleur au front.

— Mon avis, dit-il après un court silence, mon avis est bien simple : abandonner tout, fuir et nous mettre en sûreté au plus vite.

— Allons donc ! cœur de poulet que vous êtes ! Convient-il de jeter ainsi le manche après la cognée ? L’argent que nous avons déboursé sera donc perdu ?