Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/388

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clairement quel rapport cette aventure peut avoir avec les pressentiments dont vous m’avez parlé tout à l’heure.

— Vous allez voir comme tout s’enchaîne, et quelle étrange révélation m’a été faite, il y a un mois à peine, ici même à Paris.

— Voyons, je suis tout oreille.

— Donc, il y a un mois, j’avais accepté, je ne sais comment, une invitation à dîner chez mon banquier. Au dessert, la conversation, assez languissante jusque-là, s’anime, et ce fut alors que j’entendis parler, par hasard, d’une sorcière, une espèce d’illuminée que tout le monde semblait connaître et qui, disait-on, racontait le passé et prédisait l’avenir avec une certitude effrayante ; cela piqua ma curiosité.

— Bigre ! je le crois bien.

— Poussé, je ne sais pourquoi, par un sentiment plus fort que ma volonté, je demandai à mon voisin de table l’adresse de cette femme. Vous savez combien je vis retiré, loin du monde, et, à part nos affidés, ne connaissant pas à Paris dix personnes ?

— C’est exact.

— Cependant je réussis à obtenir certains renseignements qui tous corroboraient ce que d’abord on m’avait dit ; aussi je résistai longtemps, cette clairvoyance me faisait peur.

— Je comprends cela ; quand on a une existence aussi accidentée que l’a été la nôtre, on n’aime pas à se l’entendre raconter de but en blanc par des étrangers : cela peut être dangereux.

— Je fis toutes ces réflexions, mais ma curiosité fut la plus forte. Je résolus enfin d’aller consulter cette femme. Elle habitait tout en haut du faubourg Saint-Jacques ; la course était longue. Je ne vous décrirai pas l’horrible taudis dans lequel je fus introduit. Cette maison, fort vieille, ne semblait tenir que par artifice et tremblait au plus léger souffle de vent. Je fus sur le point de retourner sur mes pas, mais je pris mon courage à deux mains ; et, après avoir traversé un long corridor presque obscur, je