Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/406

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— Vous êtes bien clément ! Est-ce la peur que vous avez eue qui vous rend si doux aujourd’hui ?

— Non, ce n’est pas cela, bien que, j’en conviens, j’ai véritablement eu très peur, mon esprit était prévenu, et…

— Passons, il est inutile de revenir là-dessus.

— J’aime autant cela, ce qui me fait vous demander de ne pas vous occuper davantage de ce drôle, c’est d’abord que je suis convaincu qu’il ne peut nous nuire en rien ; et de plus que nous avons déjà assez d’affaires très sérieuses sur les bras sans que nous nous embarrassions encore de celle-là.

Le Mayor se mit à rire.

— Mon cher Oyandi, vous êtes, sur ma parole, la nature la plus extraordinaire que je connaisse. Jamais je n’ai vu chez aucun homme un mélange aussi bizarre de folle audace et de poltronnerie ridicule.

— Bon ; cela vous plaît à dire ?

— Non pas, cela est.

— Admettons, mais pourquoi cette sortie tout au moins blessante pour moi ?

— À propos de ce que vous me dites.

— Je ne comprends pas ?

— Voyons, supposez-vous de bonne foi que ce soit pour mon plaisir que j’aie tiré quatre coups de revolver au risque d’attirer la police chez vous, et que j’aie tenté de tuer cet homme ; car, s’il court encore, vous comprenez, n’est-ce pas, que ce n’est pas de ma faute, et que mon intention était bien de le tuer ?

— Cela ne fait pas un doute pour moi.

— Eh bien ! alors, comment se fait-il que vous ne compreniez pas que si j’ai tiré sur cet homme, malgré les risques sérieux que je pouvais vous faire courir ainsi qu’à moi, c’est que j’avais des raisons de la plus haute importance pour agir ainsi ?

— Soit ; mais enfin cet homme est seul, ou à peu près. Il voulait me jouer un tour indigne, j’en conviens : il a été poussé à cela par cette maudite sorcière, que le diable