Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/56

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les mains de ce misérable ! Oh ! mon père, plutôt mourir que subir un tel outrage !

— Rassurez-vous, mon enfant, cela n’arrivera jamais, dit le docteur en l’attirant vers lui et l’embrassant.

— N’ayez pas cette crainte, chère Denizà, s’écria Julian avec feu, jamais, tant que je vivrai, cet homme ne vous approchera, je vous le jure !

— J’en fais mon affaire, dit froidement Bernardo, je le tuerai comme une bête puante qu’il est, à notre première rencontre ; d’ailleurs, Julian et moi nous ferons bonne garde près de vous.

— Oui, dit Julian avec ressentiment, il a déjà senti nos griffes ; qu’il ne se retrouve plus sur mon chemin !

— D’ailleurs, le Mayor ne manque pas de motifs pour tenter sa hasardeuse expédition, reprit le docteur : d’abord, le magnifique butin dont il espère s’emparer ici, et ensuite la vengeance éclatante qu’il espère obtenir contre vous deux.

— Ces deux motifs sont plus que suffisants pour le pousser aux expéditions les plus folles, dit Bernardo. Le Mayor n’estime au monde que l’or et les diamants, tout le reste lui est égal ; je crois que dans son for intérieur, il se soucie fort peu que sa femme soit morte ou vivante.

— Cela peut être, dit Julian, et je ne suis pas éloigné de partager ton opinion à ce sujet, mon cher Bernardo. Mais la comtesse de Valenfleurs n’est pas dans ce cas. Quel est notre devoir dans cette circonstance ? Devons-nous lui révéler l’existence de son mari et lui apprendre ce qu’il est devenu, ou bien convient-il de garder le silence sur cet horrible secret et la laisser dans son ignorance et dans sa quiétude ? Voilà les deux questions qui se présentent à mon esprit et que nous devons résoudre, soit par l’affirmative, soit par la négative.

— Oh ! s’écria Denizà avec âme, est-il possible que vous hésitiez un instant à décider cette question, messieurs ? Le marquis et la marquise de Garmandia n’existent plus ni l’un ni l’autre, aux yeux du monde comme à ceux de Dieu : le marquis, par un crime horrible,