Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/55

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— Les renseignements que nous possédons sur cette affaire me portent a croire que si le Mayor n’a pas acquis la certitude de l’existence de sa femme, tout au moins il la soupçonne. Pour un scélérat de cette trempe, les obstacles n’existent pas ; il tentera les plus grands efforts pour découvrir la vérité.

— Cela est certain, si nous lui en laissons le temps ; c’est à nous à l’en empêcher, dit vivement Bernardo.

— Sans doute, et nous y mettrons tous nos soins. Mais, jusqu’à preuve du contraire, j’ai la conviction intime que le Mayor n’attache qu’une importance médiocre aux confidences que son complice Sebastian a pu lui faire. Certain de l’efficacité des moyens qu’il a employés pour faire disparaître sa malheureuse femme, connaissant, de plus, le procès-verbal dressé lors des recherches faites dans la maison hantée et l’exhumation du cadavre de sa victime, si complètement reconnue à sa chevelure, ses vêtements marqués à son chiffre, et surtout à son alliance, retrouvée dans un de ses gants, tout me fait supposer qu’il attribue ce que lui a dit son complice à une ressemblance fortuite, et surtout aux remords qui se sont éveillés dans l’âme de boue de l’ancien matelot et lui ont tourné la tête.

— Cela est possible, en effet, mon père, dit Julian.

— Mais s’il ne croit pas encore, et comment pourrait-il croire ? la curiosité s’est éveillée en lui, et il veut s’assurer que cette ressemblance est aussi frappante que Sebastian le soutient.

— Pensez-vous donc, mon père, que cette curiosité, si forte qu’elle fût, aurait suffi pour le décider à essayer de s’emparer de l’hacienda ?

— Je ne dis pas cela, fils ; cette curiosité dans tous les cas, ne saurait être qu’accessoire ; d’ailleurs, ce n’est pas à lui qu’est venue la pensée de cette expédition, mais à son complice Oyandi, qui, lui, connaît la présence de notre chère Denizà à l’hacienda, et dont le but avoué est de s’emparer d’elle pour se venger enfin de toi.

— Moi ! s’écria Denizà avec horreur ; moi tomber entre