à l’improviste. Dans le premier moment, je ne l’avais pas reconnu, mais, en le regardant bien, je vis à qui j’avais affaire, c’est-à-dire à l’âme damnée du Mayor, l’instigateur et le complice de tous les crimes odieux que cet horrible bandit a commis depuis quinze ans dans les savanes. Je vous avoue que dans le premier moment, je fus assez embarrassé de ma capture.
— Je comprends cela, répondit Belhumeur.
— Il y avait de quoi, fit le Castor.
— Quel parti avez-vous pris définitivement ? demanda le Cœur-Loyal.
— Deux raisons m’ont engagé à prendre la détermination à laquelle je me suis arrêté. Je dois vous dire tout d’abord que le Mayor, qui sans doute a de bonnes raisons pour craindre les révélations de ce misérable, a eu l’audace de m’envoyer un de ses bandits en parlementaire pour m’ordonner, en me faisant les menaces les plus atroces, si je n’obéissais pas à ses injonctions impérieuses, de rendre la liberté à mon prisonnier.
— Ce bandit ne doute de rien, dit le Cœur-Loyal ; est-ce que nous n’en débarrasserons pas enfin la savane ?
— Nous tâcherons, dit Belhumeur.
— Ce sera dur, fit le Castor en hochant la tête.
— Bah ! ajouta Berger. Quien sabe ? Qui sait ? comme disent les Mexicains.
— Alors ? demanda Belhumeur.
— Ce parlementaire voulut parler haut, faire l’insolent ; je le traitai comme il le méritait, et il devint subitement doux comme un agneau.
— Je le crois bien, tu as failli l’assommer d’un coup de poing, dit Bernardo en riant.
— C’est ainsi qu’il faut traiter ces brutes immondes, dit Belhumeur ; c’est le seul moyen d’en venir à bout.
— Bref, après cette leçon donnée, reprit Julian, je renvoyai le parlementaire à demi mort. Sebastian est un scélérat couvert de crimes et indigne de pitié ; dans l’hacienda je ne pouvais rien faire sans exposer don Cristoval à des embarras et à des tracas à n’en plus finir avec les