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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/225

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— Lequel ? Parlez, répondit-il vivement, et le visage rayonnant d’espoir.

— Un moyen devant lequel un honnête homme n’hésite jamais, monsieur, quand il aime véritablement une jeune fille comme vous prétendez m’aimer.

— Quel est ce moyen, dites, je vous en supplie !

— Me demander ma main. C’est, je le répète, ce qu’aurait fait un honnête homme.

M. de Montréal se laissa tomber avec accablement dans un fauteuil et cacha sa tête dans ses mains.

La jeune fille se sentit trembler à l’effet produit par ses dernières paroles.

Elle ne comprenait pas pourquoi cet homme, en les entendant, avait éprouvé une si grande émotion.

Mais il ne lui laissa pas le temps de réfléchir longtemps, car se redressant tout à coup, le visage livide, le regard étincelant, il s’avança vers elle d’un pas automatique ; et d’une voix qui sifflait entre ses dents :

— Je vous ai trompée ! s’écria-t-il avec un ricanement terrible, je ne suis pas un honnête homme !… Je suis un misérable mis au ban de la société ! un voleur ! un assassin ! condamné à mort par contumace, que l’échafaud attend demain !

Il était beau ainsi, ce bandit, en ce moment, de la beauté sinistre du mauvais ange après la chute. Son buste était fièrement cambré en arrière, ses cheveux flottaient autour de sa tête comme une sombre auréole, et une lueur fauve jaillissait de sa prunelle et lançait des effluves magnétiques.

La jeune fille se recula épouvantée.

— Oh ! s’écria-t-elle.

— Tu sais tout, maintenant, Lucy ! s’écria-t-il d’une voix vibrante ; tu connais ma honte, mon déshonneur et mon amour !

— Taisez-vous ! oh ! taisez-vous, monsieur ! s’écria-t-elle avec égarement, je ne vous crois pas ! je ne veux pas vous croire !

— Folle que tu es, reprit-il avec une ironie cruelle, tu