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LES RODEURS DE FRONTIÈRES


XIV

LA CONDUCTA DE PLATA.


Nous reviendrons, maintenant, à la caravane que nous avons vue quitter le Potrero au lever du soleil et au chef de laquelle Carmela avait semblé si vivement s’intéresser.

Ce chef était un jeune homme de vingt-cinq ans environ, aux traits fins, hardis et distingués ; il portait, avec une suprême élégance, le costume brillant de capitaine de dragons.

Bien qu’appartenant à une des plus nobles et plus anciennes familles du Mexique, don Juan Melendez de Gongora n’avait voulu devoir qu’à lui-même son avancement dans l’armée, prétention extraordinaire dans un pays où l’honneur militaire est considéré presque comme rien, et où seulement les grades supérieurs donnent à ceux qui en sont revêtus une considération qui est plutôt de la part de la population un effet de la crainte que de la sympathie.

Cependant don Juan avait persévéré dans ses idées excentriques, et chaque grade obtenu par lui avait été, non pas la récompense d’un pronunciamiento bien réussi en faveur de tel ou tel ambitieux général, mais celle d’une action d’éclat. Don Juan appartenait à cette classe de véritables Mexicains, qui aiment réellement leur pays et qui, jaloux de son honneur, rêvent pour lui une réhabilitation sinon impossible, du moins bien difficile à atteindre.