Page:Aimard - Les Rôdeurs de frontières, 1910.djvu/239

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion
233
LES RODEURS DE FRONTIÈRES

— Vous ne devez rien entendre encore, en effet, dit-il, car vos oreilles ne sont pas comme les miennes habituées à saisir les moindres bruits du désert. Ayez foi en mes paroles, rapportez-vous-en à une expérience qui ne m’a jamais fait défaut : vos ennemis approchent.

— Que faire ? murmura doña Carmela.

— Fuir, s’écria le métis.

— Écoutez, reprit impassiblement le chasseur, les Apaches sont nombreux, ils sont rusés, mais nous ne pouvons les vaincre que par la ruse. Si nous essayons de résister nous sommes perdus, si nous fuyons tous trois ensemble tôt ou tard nous tomberons entre leurs mains. Pendant que moi je demeurerai ici, vous, vous fuirez avec la señorita ; seulement ayez soin de garnir les pieds de vos chevaux afin d’assourdir le bruit de votre course.

— Mais vous ? s’écria vivement la jeune fille.

— Ne vous ai-je pas dit que je demeurerais ici ?

— Oui, mais alors vous tomberez entre les mains des païens et vous serez inévitablement massacré.

— Peut-être ! répondit-il avec une inexprimable expression de mélancolie, mais au moins ma mort aura servi à quelque chose puisqu’elle vous aura sauvée.

— Fort bien, dit Lanzi, je vous remercie de votre offre, caballero ; malheureusement, je ne puis ni ne veux l’accepter, les choses ne doivent pas se passer ainsi : c’est moi qui ai commencé l’affaire, c’est moi seul qui prétends la terminer à ma guise. Partez avec la señorita, remettez-la entre les mains de son père, et si vous ne me revoyez pas et qu’il vous demande ce qui s’est passé dites-lui simplement que