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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

l’audace avec laquelle, après les avoir désarmés les uns après les autres de leurs fusils, il avait traversé la rivière pour revenir pour ainsi dire se livrer entre leurs mains, car s’ils n’avaient plus de fusils, leurs pistolets et leurs couteaux leur restaient.

— Ça, messieurs, dit le Canadien en fronçant le sourcil, jetez s’il vous plait l’amorce de vos pistolets, ou, vive Dieu ! nous allons en découdre.

Les domestiques se souciaient peu d’entamer une lutte avec lui, d’ailleurs la sympathie qu’ils éprouvaient pour leur maître n’était pas grande, tandis qu’au contraire le Canadien, grâce à la façon expéditive dont il avait agi, leur inspirait une crainte superstitieuse extrême ; ils obéirent donc à son injonction avec une sorte d’empressement, ils voulurent même lui remettre leurs couteaux.

— Ce n’est pas nécessaire, dit-il ; maintenant, occupons-nous à panser ce digne gentleman ; ce serait dommage de priver la société d’un si estimable personnage qui en fait le plus bel ornement.

Il se mit aussitôt à l’œuvre, aidé par les domestiques qui exécutaient ses ordres avec une rapidité et un zèle extraordinaires, tant ils se sentaient dominés par lui.

Contraints par le genre de vie qu’ils mènent de se passer de tout secours étranger, les coureurs des bois possèdent tous à un certain degré les notions élémentaires de la médecine et surtout de la chirurgie et peuvent, le cas échéant, traiter une fracture ou une blessure quelconque aussi bien que n’importe quel docteur gradué dans une Faculté, et cela par des moyens fort simples et employés ordinairement avec le plus grand succès par les Indiens.