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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

ragé, je crois que j’aurais de la peine à le tirer de là.

Cependant après quelques minutes il regarda la lame de son couteau et s’aperçut qu’elle était faiblement ternie.

— Allons, il n’est pas mort encore, tant que l’âme tient au corps il y a de l’espoir, essayons.

Après cet aparté, John Davis puisa de l’eau dans son chapeau, la mélangea d’un peu d’eau-de-vie et commença à laver avec soin la blessure ; ce devoir rempli, il la sonda et s’aperçut qu’elle était peu profonde, la perte abondante du sang avait selon toute probabilité amené l’évanouissement. Rassuré par cette réflexion fort juste, il pila quelques feuilles d’oregano entre deux pierres, en fit une espèce de cataplasme, l’appliqua sur la blessure et l’assujettit solidement au moyen d’une bande d’écorce ; desserrant ensuite les dents du blessé avec la lame de son couteau, il introduisit le goulot de sa gourde dans sa bouche et lui fit boire une large gorgée d’eau-de-vie.

Le succès couronna presque immédiatement les tentatives de l’Américain, car le chef poussa un profond soupir et ouvrit les yeux pour ainsi dire instantanément.

— Bravo ! s’écria John, joyeux du résultat inespéré qu’il avait obtenu. Courage, chef, vous êtes sauvé. By god ! vous pouvez vous vanter d’avoir été rappelé de loin !

Pendant plusieurs minutes, l’Indien demeura comme hébété, promenant autour de lui des regards effarés, sans avoir conscience ni de la situation dans laquelle il se trouvait, ni des objets qui l’environnaient.