Page:Aimard - Les Trappeurs de l’Arkansas, 1858.djvu/229

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Cependant la nuit s’avançait, la lune avait disparu, des ténèbres épaisses planaient sur le camp plongé dans le silence.

Tout le monde dormait ou paraissait dormir, seul le guide qui avait voulu se charger de la première garde veillait assis sur un ballot ; les bras croisés sur la poitrine et le regard fixe, il s’enfonçait de plus en plus dans de sombres rêveries.

Tout à coup une main se posa sur son épaule, et une voix murmura à son oreille ce seul mot :

— Kennedy !

Le guide, avec cette présence d’esprit et ce flegme imperturbable qui n’abandonnent jamais les Indiens et les métis, jeta un regard soupçonneux autour de lui afin de s’assurer qu’il était bien seul, puis il saisit la main qui était restée appuyée sur son épaule et entraîna l’individu qui lui avait parlé et qui le suivit sans résistance dans un endroit écarté où il se crût certain de n’être surveillé par personne.

Au moment où les deux hommes passèrent devant la tente, les rideaux s’entrouvrirent doucement et une ombre glissa silencieuse à leur suite.

Lorsqu’ils furent cachés au milieu des ballots, et placés assez près l’un de l’autre pour parler d’une voix basse comme un souffle :

— Dieu soit loué ! murmura le guide, j’attendais ta visite avec impatience, Kennedy.

— Savais-tu donc que je devais venir ? répondit celui-ci avec défiance.