Page:Aimard - Les Trappeurs de l’Arkansas, 1858.djvu/258

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— Mais, demanda Belhumeur, c’est aujourd’hui, dites-vous, vieillard, qu’elle doit être brûlée ?

— Oui.

— Il est encore temps, alors ?

— Hélas ! c’est au lever du soleil, et voyez, fit-il avec un geste navrant en désignant le ciel.

— Oh ! s’écria le Cœur-Loyal, avec une expression impossible à rendre, je sauverai ma mère !

Et se penchant sur le cou de son cheval il partit avec une rapidité vertigineuse.

Les autres le suivirent.

Il se retourna vers Belhumeur :

— Où vas-tu ? lui demanda-t-il d’une voix brève et saccadée.

— T’aider à sauver ta mère ou mourir avec toi !

— Viens ! répondit le Cœur-Loyal en enfonçant les éperons dans les flancs sanglants de sa monture.

Il y avait quelque chose d’effrayant et de terrible dans la course affolée de ces trois hommes qui, tous trois sur la même ligne, le front pâle, les lèvres serrées et le regard fulgurant, franchissaient torrents et ravins, surmontant tous les obstacles, pressant incessamment leurs chevaux qui dévoraient l’espace, poussaient de sourds râlements de douleur et bondissaient frénétiquement dégouttants de sang et de sueur. Par intervalles, le Cœur-Loyal jetait un de ces cris particuliers aux Ginetes mexicains,