Page:Aimard - Les invisibles de Paris, 1893.djvu/238

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Alors, monsieur, c’est chose réglée.

— Oui, lieutenant. Il ne me reste plus qu’à vous prier de me pardonner…

— Quoi, monsieur ?

— L’ennui que je viens de vous causer, en vous forçant à remplir le rôle de consignataire…

— Enchanté, monsieur, de vous avoir été agréable.

Ils sortirent du carrosse.

— Encore une question, lieutenant ?

— Faites.

— À quelle heure devons-nous venir à bord, demain ?

— À cinq heures au plus tard.

— Vous partez à… ?

— Àsix heures précises.

— Mille remerciements, lieutenant.

— Votre serviteur, monsieur.

Ils échangèrent un dernier coup de chapeau.

L’étranger descendit dans son canot.

Sur son ordre, le canot poussa au large et se dirigea rapidement vers la terre.

En mettant le pied sur le quai, l’étranger jeta un regard soupçonneux autour de lui.

La nuit commençait à tomber.

Le quai était presque désert.

Cependant, en apercevant l’étranger, deux hommes, enveloppés d’épais manteaux, et les ailes de leurs sombreros rabattues sur les yeux, qui se tenaient assis devant la porte d’une neveria, jetèrent les cigares qu’ils avaient aux lèvres.

À ce signal, l’étranger s’avança vers eux sans hésitation.

On lui offrit une chaise.

Il accepta et s’assit.

— Eh bien ? demanda l’un de ces hommes.

— C’est fait, répondit-il.

— Sans difficulté ?

— Pas la moindre.

— Avez-vous vu le capitaine ?

— Non pas. Il était absent.

— Et le second ?

— Le second aussi.

— Voilà qui est singulier. Nous ne les avons pas aperçus à terre.

— C’est ainsi.

— Allons ! tant mieux, après tout. Vous ne les connaissez ni l’un ni l’autre, n’est-ce pas ?

— Ils ne m’ont jamais vu.

— C’est vrai. Pour quelle heure est-ce fixé ?

— Demain, à cinq heures de l’après-midi.