Page:Aimard - Les invisibles de Paris, 1893.djvu/560

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— Oui.

— Sont-ils nombreux ?

— Non. Mais, j’en suis sûr, leurs principaux chefs sont cachés dans cette maison.

— Ah ! si nous réussissions à nous en emparer…

— Ce serait une rude affaire.

— Loin d’être blâmés, continua le commissaire de police, on nous voterait une récompense nationale.

— Oui ! oui ! je le sais ; le gouvernement a pris à cœur de mettre la main sur ces malfaiteurs.

— Sont-ce des malfaiteurs ? fit naïvement son interlocuteur.

— Pas précisément ; mais ça en approche.

— Très bien ! ajouta le commissaire ; je vais procéder à une visite complète depuis la cave jusqu’au grenier.

— C’est convenu. Mais…

— Mais quoi encore ?

— Avant tout, écoutez-moi.

— J’écoute.

— Suivez-moi.

— Ça se chante, ces mots-là, répliqua le commissaire, qui ne manquait jamais de placer une de ces fines plaisanteries qui faisaient les beaux jours de nos prédécesseurs, en l’an de grâce mil huit cent quarante-sept.

— Venez.

Cela dit, M. Jules conduisit le commissaire auprès du comptoir, à l’endroit où gisait toujours l’inconnu.

M. Jules souleva le masque de l’inconnu et dit au commissaire :

— Regardez maintenant.

Le commissaire de police obéit et recula de trois pas, en proie à une stupéfaction inimaginable.

— Le duc de…, s’écria-t-il.

— Silence ! fit vivement M. Jules, ne prononcez pas ce nom-là ici.

— Bon ! répondit l’agent, on se taira. Mais comment se trouve-t-il dans cette maison, gisant au milieu de ces gueux ?

— C’est lui qui dirigeait l’affaire.

— Bah ! vous étiez sous ses ordres ?

— Directs, cher monsieur.

— Oh ! oh ! voilà qui change la thèse.

— N’est-ce pas ? Je savais bien que nous finirions par nous entendre.

Et M. Jules retrouva une partie de sa belle assurance, qu’une succession d’échecs et de revers imprévus avait entamée.

— Que faire ? que faire ? se demandait à part lui le commissaire de police, embarrassé au dernier chef.

L’agent l’examinait attentivement sans en avoir l’air.

Après s’être adressé cette question tout bas cinq ou six fois, le commissaire finit par se l’adresser tout haut.

M. Jules saisit la balle au bond et lui répondit :