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LA CIGALE

I

FLÉAU DE DIEU… FLÉAU DU DIABLE ?

Le trou débouché par la Cigale se trouvait, on le sait, à environ vingt-cinq mètres au-dessous du sol.

Il avait sept pieds de haut et quatre pieds dans sa plus grande largeur.

En somme, c’était un des nombreux points de repère de l’un de ces conduits souterrains que les bons Parisiens foulent aux pieds sans s’en douter le moins du monde.

Ce conduit, coupé en plusieurs endroits, finissait par se relier à l’ancien ruisseau de Ménilmontant, si important jadis, aujourd’hui si généralement ignoré.

À quelle époque et par qui ce conduit avait-il été enserré de murailles ?

Dans quel but l’avait-on voûté de la sorte ?

Nul ne s’en doutait, ces constructions se montant à la plus haute antiquité.

Elles avaient été établies, avec une solidité à toute épreuve, par une intelligence remarquable, et malgré la profondeur où le travail de tant d’années successives les avaient enfouies, l’air y circulait avec la plus grande facilité.

Depuis un siècle peut-être nul pied humain ne s’était trouvé à même de fouler ce ruisseau perdu.

Le hasard seul, suite de recherches concernant l’affaire de Belleville, au sujet de laquelle M. Jules, l’ex-chef de la police de sûreté, et le comte de Warrens, chef de la société des Invisibles, se trouvaient en guerre ouverte, en avait relevé l’existence à ce dernier.

On comprend tout le parti qu’un homme de cette trempe devait en tirer.

Le comte de Warrens n’oubliait et ne négligeait rien.

Tout lui devenait un avantage.

Tout devenait une arme redoutable dans ses habiles mains.

Mais, quelles qu’eussent été sa vigilance et l’activité des ingénieurs affidés attachés à l’association des Invisibles, on ignorait encore la source de ce ruisseau.

Passe-Partout, San-Lucar, Mortimer et Martial Renaud s’étaient enfoncés assez avant dans le souterrain.

Par prudence et surcroît de précautions, ils avaient dépassé la courbe faite par le souterrain afin que la lueur des torches ne décelât pas leur présence.