Page:Aimard - Les invisibles de Paris, 1893.djvu/669

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Il était pâle, tremblant.

— Hervé ! qu’y a-t-il ? demanda M. de l’Estang.

L’émotion empêchait le vieillard de répondre. Brigitte s’élança dans le parc.

— Vous êtes blessé ?

— Non.

— Pourquoi ce cri alors ?

— La demoiselle…, répliqua-t-il d’une voix sourde.

— Ah ! Edmée ?

— Oui…, fit le vieux sergent, n’osant achever.

— Eh bien ! parlez ! que lui est-il arrivé ?

— Je ne sais pas.

— Vous ne savez pas ?… Comment !… Expliquez-vous !… Je ne vous comprends pas.

— Elle n’est pas où nous l’avons laissée.

— Vous vous trompez.

— Non.

— Vous avez mal cherché.

— J’ai cherché de tous les côtés.

— Et…

— Et… elle n’y est plus…

— La malheureuse enfant ! Venez, venez…, nous la retrouverons…

— Faut l’espérer… Allons ! je n’aurais pas dû la quitter.

Ils allaient s’élancer au dehors.

Brigitte rentra.

Elle tenait une lettre à la main ; elle l’avait trouvée au pied du sycomore.

Le vicomte s’en saisit.

Pendant qu’il la parcourait rapidement, Hervé Kergraz et la vieille Brigitte cherchaient avec anxiété à lire sur son visage ce qu’il fallait espérer ou craindre.

— Ah ! mes amis, s’écria-t-il avec égarement, courons, tâchons d’arriver à temps.

— La demoiselle…

— Un danger de mort la menace… Voici ce qu’elle m’écrit :


« Mon frère,

« Remplissez votre lâche. Moi je vais où l’amitié et la reconnaissance m’appellent. Ne vous inquiétez point de moi. Nos amis, prévenus d’un piège qui leur est tendu dans l’ombre, sauront bien me défendre. Songez à votre aïeul, à notre père, à l’honneur de notre nom. Partez, faites votre devoir. Hervé l’a dit : Dieu est avec moi.

« Votre sœur,
« Edmée de L’Estang. »

— Eh bien ! notre jeune monsieur, que comptez-vous faire ? demanda le père Pinson, qui avait retrouvé toute sa présence d’esprit.

— La rejoindre, la protéger, la secourir tout d’abord.