Page:Aimard - Les invisibles de Paris, 1893.djvu/674

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— Pardi ! son majordome, son chien enragé, son nègre blanc.

— Marcos Praya ?

— Lui et les autres.

— On les avait pourtant rudement ficelés…, grommela la Cigale.

— Il est venu un gros rat qui a mangé les ficelles, mon bon oncle. Aussi la première chose qu’ils ont faite a été de délivrer la comtesse, de l’arracher à nos deux camarades, qui ont voulu tenir bon, pour leur malheur.

— Cré mâtin ! on verra ! dit violemment la Cigale. S’ils m’ont abîmé Filoche de fond en comble…

— Non. Ils ne l’ont assommé qu’à moitié ; c’est l’autre qui a gobé le bouillon.

— Il est mort ?

— Tout ce qu’il y a de plus mort… et enterré.

— Enterré ?

— Oui.

— Par qui ?

— Par ces messieurs qui se sont donné la peine de lui trouer le dos jusqu’à la poitrine, puis de le jeter dans un grand fossé où se trouvent deux pièges à loups.

— Tu l’as vu ?

— D’un œil au moins…, et, ma foi, je ne l’ai pas dérangé dans ses attributions. Seulement, on avait recouvert le fossé avec des branchages, des troncs d’arbres, des poutres, pour faire un pont et le traverser.

— Eh bien ! tu t’en es servi ? Après ? fit le géant.

— Après ? Après être passé et repassé plusieurs fois, je suis convenu avec Filoche de ce que vous allez voir, si vous voulez bien vous donner la peine de me suivre.

— Te suivre où ? dit Passe-Partout.

— Du côté du château, répliqua le gamin en clignant de l’œil. Ça ne peut que faire votre affaire, patron ; rapportez-vous-en à moi.

— Mauvais diablotin ! tu as outrepassé mes ordres.

— Non pas. J’ai chanté juste.

— Oh ! juste !… Enfin !

— Vous êtes difficile, capitaine ; et, si vous m’accompagnez par là-bas, vous serez forcé de reconnaître que, si je chante faux moi-même, je fais danser les autres en mesure.

— Ainsi, tu ne veux pas nous en apprendre davantage ?

— Vous en saurez plus en voyant par vous-même le coup de temps ! Je ne vous dis que ça.

Le tumulte croissait au loin.

— Allons, mes amis, puisque maître Mouchette l’exige et que cette marche rentre dans mon plan, ajouta tranquillement Passe-Partout, dirigeons-nous vers le fossé en question.

— Ça y est ?… Bon !… Je crois que notre arrivée ne causera pas de chagrin à ce brave Filoche.

— Il est donc sur pied !

— Oui ! oui !… comme vous et moi. Je lui ai appliqué sur la fente qu’il