Page:Aimard - Les rois de l'océan, 1 (L'Olonnais).djvu/268

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— Pauvre enfant si pure et si douce ! tu dois me haïr ?

— Non, je ne te hais pas, Bothwell, je ne hais personne.

— Mais tu n’es pas mon amie ?

— Non, oh ! non ! car tu me fais peur !

— Je te fais peur, moi ? s’écria-t-il avec une surprise mêlée de tristesse.

— Oui ; il me semble toujours voir sur tes mains, le sang des victimes que tu as immolées, pour voler leur or.

— Oh ! fit-il plus ému qu’il ne le voulait paraître, suis-je donc un voleur, moi ! Bothwell ? le flibustier célèbre, que l’on a surnommé le fléau des Espagnols !

— Oui, dit-elle d’un air pensif, le fléau ; voilà pourquoi j’ai peur et pourtant je voulais te demander une grâce ?

— Une grâce ! toi Fleur-de-Mai ? parle, parle, enfant ; tu sais que je ne t’ai jamais rien refusé.

— Je le sais.

— Alors qui te retient ?

La jeune fille sembla réfléchir un instant.

— Pas encore ; dit-elle, comme si elle se fût parlé à elle-même ; non, l’heure n’est pas venue de t’adresser ma demande ; bientôt je parlerai, mais pas à présent.

— Dans dix minutes, je serai parti.

— Cela ne fait rien.

— Qui sait si nous ne serons pas longtemps avant de nous revoir ?

— Non, fit-elle en hochant la tête, nous nous reverrons plus tôt que tu ne penses.

— Mais…

— Au revoir, capitaine Bothwell, à bientôt !

Elle s’envola légère comme un oiseau.

— Singulière fille ! murmura le capitaine dès qu’il fut seul.

Un instant plus tard Danican parut.