Page:Aimard - Les rois de l'océan, 1 (L'Olonnais).djvu/299

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Celui-ci, nous devons le constater, ne parlait pas avec son laisser aller ordinaire ; il cherchait ses mots, semblait tâtonner, comme un homme peu sûr de ce qu’il dit ; parfois même il hésitait, enfin il paraissait bien plus forger une histoire que raconter un fait dont il avait été témoin.

— N’est-ce pas ? reprit-il, et pourtant la chose est ainsi ; cette affaire d’enfant causa beaucoup de bruit dans le pays à cette époque ; on en parla longtemps ; d’autant plus que le docteur Guénaud, était le médecin de la Reine-mère, Anne d’Autriche et de M. le cardinal Mazarin ; les bonnes gens du pays soutenaient qu’un homme, si haut placé que le docteur, ne se serait pas ainsi mêlé d’une affaire comme celle-là, si de grands personnages ne s’y étaient pas trouvés compromis ; les langues marchèrent un train du diable ; chacun essayait de percer le mystère.

— Et on découvrit ?

— Rien du tout.

— Comment rien ?

— Absolument rien ; tu arrives de France, par conséquent tu sais quelle puissance d’investigation possèdent les provinciaux, quand il s’agit de découvrir un secret, pouvant perdre l’honneur où la réputation d’un ami où d’un voisin ! Eh bien ! tous leurs efforts furent inutiles, les combinaisons les plus machiavéliques, et Dieu sait ce que l’on inventa ! demeurèrent sans résultats. Il fut constaté que dans un réseau de trente lieues à la ronde, pas une seule femme n’avait accouché cette nuit-là. Le docteur était venu directement de Paris aux Sables, sans s’arrêter nulle part. Et puis, ce qui confondit tous les calculs, c’est que tu étais né depuis à peine une heure, quand tu fus confié, par le docteur, aux pauvres gens qui se chargèrent de toi.

— Tout cela est vrai ; murmura l’Olonnais devenu pensif.

— C’était un écheveau véritablement embrouillé par le diable, reprit Vent-en-Panne ; il y avait de quoi don-