Page:Aimard - Les rois de l'océan, 1 (L'Olonnais).djvu/305

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— Prends garde, matelot ! s’écria-t-il ; prends garde à ce que tu viens de dire ! j’étais résigné, je courbais humblement la tête, je ne demandais rien, et maintenant…

— Maintenant, je te le répète, s’il n’existe pas d’autres empêchements que ceux que je t’ai signalés, tu l’épouseras !

— Oh ! s’écria le jeune homme en cachant sa tête dans ses mains.

Et succombant à son émotion, il tomba à la renverse sur son lit.

Mais cette syncope fut courte, le jeune homme reprit presque aussitôt ses sens.

— Sois fort dans la joie, comme tu l’as été dans la douleur, lui dit doucement Vent-en-Panne ; l’homme énergique ne se laisse jamais surprendre ; espère, te dis-je, et souviens-toi, ajouta-t-il avec une émotion étrange chez un pareil homme, que tu as un ami, presque un père.

— Oh ! oui, oui ! un père ! s’écria le jeune homme en fondant en larmes.

Un doux et mélancolique sourire errait sur les lèvres pâlies du frère de la Côte ; sans répondre, il ouvrit les bras à l’Olonnais qui se précipita sur sa loyale poitrine, et cacha en sanglotant sa tête dans son sein.

Les deux hommes demeurèrent longtemps embrassés, confondant leurs larmes et leurs caresses, puis Vent-en-Panne repoussa doucement son jeune compagnon et le replaça sur son lit, sans que celui-ci essayât la moindre résistance.

— Maintenant que nous nous entendons, car nous nous entendons, n’est-ce pas ? dit le flibustier.

— Oui, oh ! oui, mon ami, mon père ! répondit le jeune homme avec âme.

— Maintenant, continua le flibustier, toute explication devient inutile entre nous ; il n’est plus nécessaire de revenir sur ce sujet, compte sur moi dans l’occasion, comme de mon côté, je compterai toujours sur toi.