ils étaient au nombre de quatre ; chacun d’eux portait trois peaux, la chasse avait était bonne ; leur arrivée au boucan fut annoncée bien avant qu’ils parussent, par une dizaine de venteurs à mine famélique, accourant en hurlant à qui mieux mieux.
Une animation singulière régna alors dans le boucan ; chacun avait sa tâche à accomplir, et s’en donnait à cœur joie.
Le Poletais était bon pour ses engagés, il ne les surchargeait pas de travail, ne les maltraitait pas injustement, et surtout il n’hésitait pas à prendre sa part des fatigues et des ennuis du métier ; aussi tous l’aimaient-ils ; ils se seraient sans hésiter fait tuer pour lui.
Vers cinq heures du soir, au moment où le cuisinier, après avoir confectionné la pimentade, en la transvasant dans une calebasse, annonçait que le sanglier étant cuit à point, il était temps de prendre le repas du soir, Tributor et son compagnon parurent.
Ils avaient rencontré la caravane, à une lieue au plus du boucan, mais elle retournait sur ses pas. Les dames avaient été tellement effrayées, qu’elles ne s’étaient senti ni la force ni le courage de continuer leur promenade, interrompue d’une façon aussi tragique.
Aussitôt après le combat, M. d’Ogeron avait expédié un engagé à Port-Margot, avec l’ordre de ramener des chevaux le plus promptement possible ; puis les chevaux arrivés, malgré les instances de Montbarts et de ses compagnons, toute la troupe avait repris le chemin du Port-Margot, où sans doute, ajoutait Tributor avec cette logique qui le caractérisait, elle devait être arrivée déjà, ou du moins en être fort près.
Quant à l’Olonnais, il n’avait voulu ; sous aucun prétexte se séparer de ses nouveaux compagnons ; mais il chargeait Tributor de rassurer son matelot, et de lui dire qu’il n’avait jamais été si heureux ; phrase qui fit froncer les sourcils au vieux flibustier, et sembla lui donner fort à penser ; il eut même un moment d’hésitation et parut vouloir reprendre le chemin du Port-Margot.