— C’est à dire que je suis suspendu à vos lèvres ; que je bois vos paroles.
— Vous me flattez, capitaine.
— Nullement, je vous assure.
— Vous savez, n’est-ce pas, capitaine, de quelle façon fut arrêté le duc de Beaufort ?
— Parfaitement ; au palais Cardinal, il y a cinq ans ; on le conduisit à Vincennes.
— Dans le donjon, oui, où il serait peut-être resté toute sa vie…
— Pardon, maître Parizot, pourquoi donc parlez-vous au passé de la captivité de ce pauvre duc ?
— Vous allez voir, capitaine.
— C’est juste, continuez.
— Le prisonnier était gardé à vue, par un officier et huit soldats, qui marchaient, quand il marchait, s’arrêtaient quand il s’arrêtait, et pour plus de sûreté couchaient dans sa chambre.
— Peste ! quel luxe de précautions ! le cardinal avait donc grand’peur qu’il s’évadât ?
— Une peur effroyable ! mais rien n’y fit ; le dévouement d’un homme du peuple déjoua toutes les subtiles combinaisons du cardinal.
— Oh ! oh ! cela devient intéressant.
— Cet homme arrêté pour avoir tué un lapin sur la chasse de son seigneur, avait été sauvé des galères et peut-être de la potence par le duc de Beaufort, alors tout-puissant. Le pauvre diable voua une reconnaissance sans bornes à son sauveur ; lorsque les amis du duc l’oubliaient, lui seul il se souvint et jura de rendre la liberté à celui qui lui avait conservé la sienne.
— Pardieu ! voilà qui est beau ! et comment s’y prit ce brave garçon ?
— Le duc n’avait pu obtenir un seul de ses domestiques ; M. de Chavigny, le gouverneur du château, était son ennemi personnel ; toute évasion paraissait donc impossible. L’homme dont nous parlons ne se rebuta pas. Après s’être entendu avec quelques amis du duc, il