son, que ceux-là mêmes qui les emploient et les paient le plus cher, n’éprouvent pour eux que mépris et dégoût.
Les matelots du San Juan de Dios savaient parfaitement dans quel but les deux aventuriers étaient à bord ; ils ne leur avaient pas adressé la parole, depuis les sept ou huit heures que durait le voyage ; ils les tenaient à l’écart ; en un mot, pour nous servir d’une expression maritime caractéristique, il les avaient mis en quarantaine.
Les aventuriers, trop hautains de leur nature pour essayer de lier connaissance et de s’attirer la sympathie de gens qu’ils considéraient comme au-dessous d’eux, n’avaient pas semblé s’apercevoir de l’isolement systématique dans lequel on les avait laissés.
Mais maintenant la situation changeait pour eux ; elle commençait même à devenir menaçante. Force leur était d’entendre les murmures des matelots. Leur parti fut vite pris. Ils allèrent trouver le capitaine.
Celui-ci était un brave et digne homme ; excellent marin ; mais ignorant, crédule et peut-être plus superstitieux à lui seul, que tout son équipage réuni. Il reçut fort mal les observations des deux frères ; comme ses matelots, il était convaincu que l’on devait attribuer à leur présence à bord, l’apparition du fantôme qui les avait si fort effrayés.
Ce n’avait été qu’à son corps défendant et pour obéir à ses chefs, qu’il avait consenti à prendre à son bord ces passagers de mauvais augure.
— Señores, leur dit-il nettement, des hommes comme vous sont une lourde charge à bord d’un navire honnête ; mes matelots ont raison.
En ce moment ces derniers avaient fini de se concerter ; ils quittèrent l’avant et se dirigèrent vers le capitaine. Arrivés près du capot de la chambre ils s’arrêtèrent et l’un d’eux, au nom de ses camarades demanda à lui soumettre une observation.