Les hommes se jetèrent sur les cargues et sur les bras, en quelques secondes le vaisseau arrêté dans son aire demeura immobile ; il était en travers.
— Oh ! de la pirogue ! cria l’officier.
— Oh là ! répondit-on aussitôt.
— Laissez-vous culer, et accostez par la hanche de tribord ! un homme paré à lancer une amarre !
Un matelot saisit un faux-bras, le leva dans sa main, sauta dans le porte-haubans et, lorsque la légère embarcation parut sur le flanc du navire, il lança le bout du filin qui fut saisi à la volée, et solidement amarré à l’avant de la pirogue, qui se toua main sur main, et ne tarda pas à accoster.
Quelques minutes plus tard, quatre ou cinq hommes grimpant comme des chats le long des flancs escarpés du vaisseau, bondirent plutôt qu’ils ne sautèrent sur le pont.
L’équipage de la pirogue était de douze hommes ; sept étaient demeurés à son bord, afin de veiller à ce qu’elle ne fût pas coulée, en se heurtant contre le puissant navire.
Ces individus qui apparaissaient d’une si singulière façon sur le pont du vaisseau français, méritent une description particulière. Quatre d’entre eux étaient des hommes de haute taille, aux traits énergiques, à la physionomie farouche, dont les regards fauves avaient une expression de volonté indomptable ; maigres, musculeux, doués en apparence d’une force herculéenne ; leur peau basanée et pour ainsi dire tannée par la pluie, le soleil, le vent et l’eau de mer, semblait collée sur leurs os et faisait ressortir leurs muscles gros comme des cordes et durs comme le fer.
Les vêtements qu’ils portaient étaient au moins aussi étranges que leurs personnes : ils n’avaient pour tout costume qu’une petite casaque de toile et un caleçon qui ne venait qu’à la moitié de la cuisse ; il fallait y regarder de très-près, pour reconnaître si ces vêtements étaient de toile ou non, parce qu’ils étaient imbibés de