Page:Aimard - Les rois de l'océan, 2 (Vent-en-panne).djvu/211

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— C’est impossible ! s’écria la duchesse en proie à une surexcitation nerveuse terrible, si ce que dit cet homme est vrai ; si j’avais eu effectivement un fils de lui, pouvez-vous admettre un instant que je l’eusse abandonné ! oh ! non ! Dieu m’en est témoin ; si criminel qu’ait été son père ! si odieux qu’il me fût devenu, j’aurais gardé cet enfant près de moi ; je lui aurais prodigué les soins les plus tendres ; est-ce qu’une mère abandonne jamais son fils ! Allons donc ! je vous le répète, monsieur, tout cela n’est qu’un tissu de mensonges !

— Non, madame, tout cela est vrai ! bientôt peut-être, me sera-t-il permis de prouver ce que j’avance ; vous l’avez dit avec raison, madame, les morts semblent sortir du tombeau. Votre frère, dont vous n’avez pas eu de nouvelles depuis si longtemps, que vous croyez mort, lui aussi sans doute, n’est-ce pas ?

— Eh bien ? s’écria la duchesse avec anxiété.

— Eh bien, il n’est pas mort, et peut-être avant peu le verrez-vous ! Pendant un mois, vous avez habité presque côte à côte avec lui ; c’est lui qui vous a sauvée, lorsque j’ai tenté de m’emparer de votre personne.

— De qui parlez-vous donc, monsieur, quel est l’homme que vous prétendez être mon frère ?

— Un des plus célèbres chefs de la flibuste, madame, le capitaine Vent-en-Panne.

— Le capitaine Vent-en-Panne ! lui, mon frère ?

— Oui madame, votre frère.

— Mais c’est impossible !

— Pourquoi doutez-vous de ma parole, madame ? quel intérêt ai-je à vous tromper ?

Il y eut un silence terrible de quelques secondes.

— Non, ce n’est pas, ce ne peut pas être ! s’écria tout à coup la duchesse ; oh ! pourquoi, vous qui vous trouviez en même temps que nous à Saint-Domingue, ne m’avez-vous pas avertie ; cela était facile, il me semble ?

— Pourquoi ? dit le duc avec mépris, parce que cet homme nous trompe, parce que tout ce qu’il nous a dit