Page:Aimard - Les rois de l'océan, 2 (Vent-en-panne).djvu/241

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— En ce moment, cher ami, vous me faites l’effet de manquer complètement de logique.

— Comment cela ?

— Dame ! je vous tuerai c’est vrai ; non pas parce que j’ai de la haine pour vous, je vous méprise trop pour cela ; mais parce que, à mon avis, vous êtes une bête venimeuse, et que je crois rendre un éminent service à la société en la débarrassant de vous, tout simplement. Ce point arrêté que je vous tue, je puis le faire tout d’un coup en vous cassant la tête avec ce pistolet, ou en vous bâillonnant, vous attachant une pierre au cou et vous jetant à la mer ; enfin j’ai mille manières de vous tuer raide.

— Ah ! fit-il sourdement.

— Oui, mais il y a cent mille façons dont je puis faire usage, pour vous infliger un martyre terrible, et vous contraindre à appeler la mort longtemps avant qu’elle daigne vous répondre. Me comprenez-vous bien ? Il dépend donc absolument de vous de mourir d’un seul coup, sans souffrir, ou d’endurer un supplice de plusieurs heures. Vous étiez flibustier, frère de la Côte, avant que de vous faire espion et mouchard ; vous rappelez-vous les supplices que les Caraïbes infligent à leurs prisonniers ? Eh bien ! c’est une torture de ce genre que je tiens en réserve pour vous, si vous m’y contraignez ; vous voyez donc que vous avez tout à gagner à répondre à mes questions.

Le visage du bandit était décomposé par la rage ; la certitude de son impuissance le rendait presque fou.

— Oh ! démon ! s’écria-t-il, tue-moi puisque tu me tiens ! si tu me laisses échapper…

— N’achevez pas, cher monsieur, c’est inutile ; interrompit placidement Pitrians, je vous donne ma parole d’honneur et de frère de la Côte, que vous ne sortirez pas vivant de cette caverne, dans laquelle vous êtes si bêtement entré ; définitivement voulez-vous me répondre, oui ou non ?

— Interroge, goddam ! puisqu’il le faut ! mais tu t’engages à me tuer raide ?