avait laissé tomber, il se l’enfonça lentement dans le cœur, comme s’il savourait la mort avec délices, et fixant sur Vent-en-Panne, immobile et terrifié, un regard d’une expression étrange :
— Tu triomphes ? lui dit-il avec un ricanement horrible ; ta vengeance est assouvie ! Eh bien, cette malédiction qu’il y a vingt-cinq ans tu m’as jetée à la face, Ludovic, je te la retourne aujourd’hui : sois maudit ! Je ne puis te tuer, mais je meurs satisfait… tu vivras désespéré, ton existence ne sera plus qu’une continuelle torture, et une heure fatale sonnera ou de même que tu as été sans pitié pour tes ennemis, ils seront sans pitié pour toi !… ta mort sera plus affreuse et plus atroce encore que la mienne !… adieu ! prends garde !
Un rire nerveux crispa les muscles bouleversés de sa face, il retomba en arrière sans essayer de se retenir ; il était mort avant de toucher le sol.
De tous les bandits, cinq seulement vivaient encore ; par ordre du gouverneur, ils furent fusillés dans la cour même de l’hacienda.
Fleur-de-Mai et l’Olonnais étaient grièvement blessés ; mais leurs blessures n’étaient pas mortelles.
Par un hasard providentiel, l’Olonnais ignorait qu’il fût tombé sous les coups de son père ; jamais ce secret ne lui fut révélé par Vent-en-Panne.
En accourant au bruit du combat, le duc de la Torre aperçut la duchesse et sa fille étendues sur le sol, il fut saisi d’une épouvantable douleur, mais bientôt il reconnut avec joie qu’elles n’étaient qu’évanouies.
Lui aussi, ignora toujours l’effroyable catastrophe qui avait amené la mort du Chat-Tigre.
Mais la duchesse et sa fille savaient tout, aussi étaient-elles en proie à une douleur mortelle, et que rien ne pouvait consoler.
Au coucher du soleil, les flibustiers et les dragons espagnols étaient de retour à la Vera-Cruz.
Les conditions stipulées pour le rachat de la ville, avaient été loyalement exécutées des deux côtés.