Cependant le débarquement s’était opéré avec cette rapidité, que mettent les Français dans tout ce qu’ils font ; cent vingt soldats bien armés, étaient rangés derrière leur commandant ; sans compter une soixantaine d’hommes restés dans les canots, prêts au premier signal à rendre d’excellents services.
— Mon cher commandant, dit le comte avec un sourire contraint, je vois que nous nous sommes mutuellement trompés ; sur ma foi de noble Espagnol, je veux vous donner l’exemple de la confiance ; voyez.
En effet, sans doute par suite de l’ordre donné par le gouverneur, un instant auparavant, les rangs des soldats s’étaient considérablement éclaircis ; la plupart des troupes étaient rentrées dans leurs quartiers : la population dont les coudées étaient rendues plus franches, se pressait autour des étrangers, sans montrer en aucune façon cette animosité, dont au dire du gouverneur elle était animée. En un mot l’aspect de la ville avait totalement changé ; de sévère et farouche, en quelques minutes il était devenu riant et amical.
— Je vous remercie, M. le comte, dit M. de Lartigues ; ce que vous faites est bien, je n’attendais pas moins de vous ; à mon grand regret, cet exemple que vous me donnez si loyalement, je ne puis l’imiter ; la prudence exige impérieusement que je me tienne sur mes gardes ; mais je vous donne ma parole de gentilhomme, que quoi qu’il arrive, les premières démonstrations hostiles et les premier coups, ne viendront pas des Français.
Le gouverneur s’inclina : les musiques militaires espagnoles, commencèrent à exécuter leurs airs les plus joyeux, et le cortège se mit définitivement en marche ; non vers le palais du gouvernement, mais vers celui, que par les soins du gouverneur, on avait préparé pour recevoir le duc de la Torre et sa famille.
Là encore, tout se passa exactement d’après le programme convenu entre M. de la Sorga et M. de Lartigues.
Lorsque le comte eut remis à l’officier français ses lettres patentes bien en règle, le duc de la Torre prit