Page:Aimard - Ourson-tête-de-fer.djvu/76

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croyez-moi, je joue à coup sûr, cet homme est condamné ; voyez-le, la terreur l’a déjà presque terrassé ; l’orgueil seul le soutient encore. Je consens cependant à lui donner une dernière chance de sauver sa vie : qu’il confesse publiquement ses crimes et qu’il en demande humblement pardon. À cette condition, je lui pardonne.

— Jamais ! s’écria Boute-Feu, arrivé au paroxysme de la rage. Ta vie ou la mienne, soit ! L’un de nous est de trop sur terre et doit disparaître ; jouons donc cette dernière partie, et sois maudit !

Il jeta les dés en détournant les yeux.

Un cri de stupeur s’éleva dans la foule.

Il avait amené rafle de cinq.

— C’est presque le coup de tout à l’heure, dit Ourson en ramassant les dés avec indifférence et les remettant dans le cornet ; mais ne te hâte pas de triompher, tu es plus près de la mort que tu ne supposes.

— Joue ! joue donc ! s’écria le boucanier d’une voix sifflante, la poitrine oppressée, les yeux hagards, en proie à une angoisse que nulle expression ne saurait rendre.

— Frères, reprit Ourson toujours impassible, ceci est le jugement de Dieu. Afin de bien vous prouver que cet homme est irrémissiblement condamné par la justice divine, je ne toucherai même pas le cornet ; l’un de vous jouera pour moi ce coup suprême.