Page:Aimard - Par mer et par terre : le batard.djvu/88

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Quelques jours s’écoulèrent, jours de soleil, dont rien ne vint ternir l’éclat ni troubler la félicité intime.

Pendant ces quelques jours, Olivier essaya d’amener tout doucement doña Dolorès à rester à Valparaiso pendant tout le temps que se prolongerait l’expédition.

Il ne se dissimulait pas les dangers terribles de ce téméraire coup de main ; il ne voulait pas que sa femme, son bien le plus cher, le seul bien véritable à ses yeux qu’il possédât au monde, y fût exposée près de lui.

Ce qu’il dépensa de diplomatie pour obtenir ce résultat si désiré fut immense il se flattait même d’avoir réussi.

Doña Dolorès, chaque fois qu’il avait entamé ce sujet, qui lui tenait si fort au cœur, l’avait toujours écouté, souriante, mais sans l’interrompre par la moindre objection. Tout à coup, un jour où il revenait encore sur cette demande, elle lui posa gentiment sa main mignonne sur les lèvres et lui dit, avec son plus délicieux sourire, de sa voix mélodieuse, dont les accents si doux allaient jusqu’au cœur du jeune marin :

– À quoi bon insister ainsi, mon Carlos chéri ? Tu sais bien que c’est impossible ! Si je me séparais de toi, ne serait-ce que pendant quelques jours, que deviendrais-je, moi, seule ici ? Je ne vis que par toi et pour toi ; je mourrais de douleur, tu le sais, tandis que tu serais loin de moi, exposé aux plus terribles dangers ! Nous n’avons qu’une âme en deux corps, ne me parle donc plus de séparation, surtout lorsque tu vas courir peut-être le plus grand danger auquel tu aies jamais été