Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/112

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

paraissent qu’un instant. Souvent même une apparence de biche ou de loup n’est qu’une souche avec deux feuilles pendantes. Cette approche et cette exploration ne rassurent pas autant qu’on croirait. Que l’apparition qui a remué le cœur ne soit qu’un tronc d’arbre, c’est une preuve ambiguë, puisque le Malin Génie de Descartes, qui est dans toutes nos pensées, peut se plaire à nous détromper. J’espère mettre au clair ce grand débat, et en sa juste place, entre l’esprit et un monde toujours insuffisant. Nous en sommes à l’enfance, où l’expérience est naïvement cherchée, et ne prouve jamais rien. On a assez dit que les primitifs sont imperméables à l’expérience ; mais c’est trop les séparer de nous. Le débat humain est celui-ci : nous cherchons la vérité, et nous ne la trouverons qu’en nous-mêmes, et par une purification, d’abord, des pensées qui dépendent de nous. C’est bien ce que signifie l’exorcisme ; mais il s’en faut que