Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/304

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donc tel qu’il est, car l’hypocrisie couvre, mais ne fait rien. Et cela même est la découverte de l’esclave, que seul l’esclave pouvait faire. Si peu qu’on profite de l’ordre, on le ménage.

Voilà donc le contraire de l’épopée, et toute grandeur niée, ce qui est l’athéisme parfait. Nul n’admire que le lion soit le plus fort, et prenne pour lui toutes les parts ; on voit jouer les griffes, et tout est dit. Chaque forme vivante fait exactement ce qu’elle peut ; la fable du Renard et de la Cigogne va jusqu’au bout de l’idée. Le chat grimpe à l’arbre, ce que le renard ne peut. Toutes les ressources de la sagesse vont à mesurer la longueur d’une patte ; l’idée que la patte ne prenne pas jusqu’où elle va ne se présente jamais. Le système que l’on nomme le matérialisme de l’histoire ne pousse pas si loin, même dans Hobbes, où les dieux et la fidélité sont finalement plus utiles que la force nue. Cette idée même, célébrée depuis sous le nom de