Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/338

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qu’on s’y plaît par cela même, car on attend autre chose ; et ce n’est à vrai dire qu’une fable, mais d’où sort, comme d’un nuage, l’esprit foudroyant de la Bible. Seulement, frappés de cette foudre, nous restons stupides un moment. C’est que nous tenons dans nos mains une vérité sauvage et piquante comme l’épine. Et, par la refuser d’abord, il faudra la comprendre toute. C’est ce que n’osera pas l’entendement séparé, qui ne se hâtera jamais d’arriver là, et qui y arrivera fatigué de preuves, et consolé d’ailleurs par le soupçon agréable d’avoir négligé quelque chose. L’entendement est moins sévère que l’esprit. Or l’esprit, ce dernier juge, ne nous fatigue pas de raisonnements, il nous force seulement à regarder. Car pourquoi un sage voudrait-il régner ? Non seulement il n’en a pas besoin, mais aussi il ne saurait pas ; ou, pour mieux dire, ce n’est pas par sagesse qu’il voudrait régner et saurait régner. Au contraire c’est toujours la par-