Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/342

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au corps ; elles ne nous touchent pas. Mais vienne l’occasion, un objet, une situation, quelque chose que nous percevons et que nous ne songeons pas à nier, alors nous pouvons nous trouver transpercés par une idée bien connue, et qui nous était inoffensive. Ces feintes, qui ne sont pas toujours voulues, trouvent entrée en nous par un point sensible et non protégé. C’est ainsi que l’événement, l’exemple, l’image, soutiennent le discours, et, en lui donnant couleur, sonorité, solidité, nous rendent enfin assurés, par tout notre être, de ce que nous acceptions, ou rejetions, ou ajournions par le seul entendement. C’est ainsi qu’une peur bien réelle nous rend présent le dieu des bois et des vallons, idée confuse, mais puissante, dont nous devrons nous arranger selon nos moyens ; car nos actions iront devant. Ce n’est plus avoir simplement l’idée, mais c’est se trouver en train de la former, et dans l’obligation de la vaincre. C’est ainsi que l’imagination nous