Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/382

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prédite à soi, et même rétrospectivement, se change en un désespoir orgueilleux. Orgueilleux parce que la puissance de nuire, qui est la puissance toute nue, se nourrit d’un fond de colère, qui ressemble aux grandes forces. Le remords, bien plus actif et bien plus entreprenant qu’on ne dit, déclare une guerre, cherche le péril, et défie le malheur. Ce point de profonde misanthropie est remarquable en ceci qu’il descend toujours. Car le culte de la puissance, d’après un jugement inexorable, va toujours à éprouver la puissance par le combat. “Comment faire la volonté de Dieu, dit Coûfontaine dans l’Otage, quand nous n’avons d’autre moyen de la connaître que de la contredire ?” On trouve ici quelque lueur sur l’âme tyrannique, que Platon seul a dévoilée ; mais les célèbres pages de la République sont encore bien obscures pour moi ; j’en suis à peine averti. Je renvoie aussi aux déclamations de Vautrin, où l’on sent un excès qui n’est que vrai,