Page:Alanic - Les Roses refleurissent.pdf/79

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Il fut aussitôt bouleversé de regret en la voyant atterrée, les lèvres tremblantes, le regarder avec une surprise chagrine.

— Pardonnez-moi !… Je viens de me montrer injuste et mauvais. Vous ne pouvez pas comprendre ce qui se passe en moi… depuis que je suis ici, entre vous deux… J’admire votre sollicitude sans cesse en éveil, pour votre frère. Et je le jalouse, oui !… Car qui donc se soucie de moi, de ma santé, et de mon bonheur ? Personne, hélas ! Je ne l’ai jamais senti aussi amèrement.

Il l’avait atteinte à ce point toujours sensible dans une âme de femme : la pitié. Elle leva ses yeux, pleins de doux reproches.

— Vous êtes injuste de nouveau envers ceux que vous appelez vos amis.

Les prunelles bleues, ardemment fixées sur elle, se brouillèrent tout à coup. Renaud lança sur la mousse les objets qui lui embarrassaient les mains. D’un mouvement prompt et irrésistible, il enlaça de son bras les épaules de la jeune fille et l’attira vers lui.

— Estelle, ne devinez-vous pas ce qui me rend ainsi susceptible et irritable ? Je souffre… Je doute… J’ai peur… J’entrevois un trop grand bonheur… S’il allait m’échapper !… Si j’arrivais trop tard dans votre vie ?… Si vous ne pouviez me répondre quand je vous supplie ?