Page:Albalat - Nella, 1877.djvu/9

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Et Nella souriait et pleurait sans rien dire ;
Et ses grands yeux brillaient, plus purs que le ciel bleu.
Oh ! qui pourra jamais révéler et décrire
L’ivresse d’un retour ou les pleurs d’un adieu ?
Dans sa chambre, abrité près d’un humble oratoire,
Comme pour écouter paraissant se pencher,
Brillait, les bras tendus, un crucifix d’ivoire :
Nella le regardait, puis alla le chercher.
« Devant ce Christ, dit-elle, Edmond, qu’il te souvienne,
Toi qui vas dans l’absence implorer le bonheur,
De venir prendre ici ta pauvre Italienne,
Car l’amour qui m’enivre est de ceux dont on meurt.
Mais Dieu, je le sais bien, ne veut pas que je meure :
Ces deux bras qu’il me tend, il me les rouvrirait.
C’est pour nous éprouver qu’il permet que l’on pleure ;
Si tu ne venais pas, il me consolerait. »
Ce fut un long instant de fièvre et de délire,
Quand pour les séparer le jour vint les revoir ;
Il fallut bien des fois et pleurer et sourire,
Avant le mot d’adieu qui fut un mot d’espoir.
Mais la nuit avait fui dans sa course étoilée,
Et l’heure qui sonnait abrégea leurs serments.
Dans un épais brouillard Rome s’était voilée,
Comme pour revêtir le deuil des deux amants.