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DU COLLÉGE.

tre le monde et le collégien interne ; et grâce aux relations établies et aux ruses qui les accompagnent, tout s’arrange pour le mieux. L’externe met à la poste les lettres du prisonnier, lui fait ses commissions, use de tous les moyens pour se procurer des traductions françaises d’auteurs grecs et latins qu’il lui communique, après en avoir fait usage pour son propre compte. À cet effet, il fréquente les bibliothèques, mais il n’arrive pas toujours à ses fins, témoin cet externe libre qui s’en va hardiment demander à la bibliothèque Royale un Salluste, avec la traduction de Dureau de La Malle. Mais cette fois il fut pincé, comme on dit : le livre lui fut nettement refusé, et pour cause. « Diable ! se dit-il, comment faire pour triompher ?… Ah ! j’y suis. » Non loin de lui se trouvait un invalide à bonne et excellente figure, qui lisait l’histoire des campagnes qu’il avait faites avec Napoléon, lecture qui rajeunissait son sang, qui réjouissait son âme belliqueuse ! Il l’aborde, et lui dit en désignant son livre : « C’est bien intéressant, n’est-ce pas ? on le devine à votre visage. — Eh ! mais oui, j’y retrouve nos prouesses. — Et moi aussi, j’ai besoin d’un livre intéressant ; eh bien, ils me l’ont refusé ! — Vraiment ! — Ah ! mon Dieu, oui ! — Demandez-le donc à ma place, vous, mon brave, pour voir s’ils vous le refuseront aussi… Voulez-vous, hein ? — Oui, certainement, mais ils vont remarquer que vous restez là sans rien faire, et… — Ah ! je vais demander un livre qu’on me donnera. — Allons, c’est convenu. »