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DE LA PEINTURE

quantités dé la même superficie sont dans un cas différent, il s’ensuit que les seules quantités parallèles à la section ne subissent en peinture aucune altération, tandis qu’au contraire les quantités qui ne sont pas situées ainsi par rapport à la section de la pyramide visuelle sont d^autant plus altérées que l’angle majeur de la base du triangle sera chez elles plus obtus.

À tout cela il est bon d’ajouter cette opinion des philosophes qui affirme que, si le ciel, les étoiles, les mers, les montagnes, les animaux eux-mêmes, et tous les corps se trouvaient réduits de moitié par la volonté divine, il arriverait que toutes ces choses ne nous sembleraient pas différer de ce qu’elles nous paraissent être présentement. Car, le grand, le petit, le long, le bref, l’étroit, le large, l’obscur, et tout ce qui peut être dans les objets ou n’y être pas, reçoivent des philosophes le nom d’accidents, et ces accidents sont de telle sorte que leur pleine connaissance ne peut se faire entièrement que par la comparaison. Énée, au dire de Virgile, dépassait des épaules tous les autres hommes, mais, comparé à Polyphême, il eût semblé un pygmée. On rapporte qu’Euryale fut très-beau, mais, auprès de Ganymède ravi par Zeus, sans doute il eût été laid. Chez les Espagnols, certaines jeunes filles passent pour blanches qui, chez les Germains, paraîtraient d’une couleur brune. L’ivoire et l’argent sont blancs, et pourtant, auprès des cygnes ou des linceuls de neige, ils semblent foncés. C’est pourquoi, en peinture, les superficies nous paraîtront très-pures et très-éclatantes