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DE LA PEINTURE

faut donc que tous les corps aient entre eux, suivant ce dont il s’agit, une convenance quant à la grandeur et quant à l’office. Mais, pour ce qui regarde un sujet qu’on puisse à juste titre louer et admirer, il faut qu’il se présente de telle sorte et pourvu de tels attraits qu’il paraisse agréable et orné, et retienne longtemps sous le charme et sous l’émotion l’esprit du spectateur instruit comme celui de l’ignorant. Ce qui, tout d’abord, dans un sujet, t’apportera quelque plaisir, c’est l’abondance et la variété des choses. De même que, dans la bonne chair et dans la musique, une abondance renouvelée charme principalement, entre autres raisons parce qu’elle apporte quelque différence et quelque changement dans les choses anciennes et habituelles, ainsi l’âme se complaît extrêmement en toute abondance et en tout changement. C’est pourquoi la variété des corps et des couleurs est agréable en peinture. Je dirai qu’une composition est très-abondante lorsque, chaque chose à sa place d’ailleurs, on y verra mêlés des vieillards, des hommes faits, des adolescents, des jeunes garçons, des matrones, des vierges, des petits enfants, des animaux domestiques, des chats, des oiseaux, des chevaux, des pécores, des édifices, des campagnes. Or, je louerai toute abondance, pourvu qu’elle soit en parfaite convenance avec ce dont il s’agit. Il en résulte que plus les spectateurs sont arrêtés par la vue des choses, plus leur gratitude envers le peintre est considérable. Mais je voudrais que non-seulement cette abondance fût parée par la diversité, mais encore qu’elle fût pondérée