Page:Alberti- De la statue et de la peinture, 1868.djvu/27

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

20
PROLOGUE.

consulaire, n’estime pas que tu sauras un mot des maîtres et que tu auras le droit d’en parler. Si tu ne les a longuement étudiés dans leurs œuvres à l’aide d’une forte méthode que la connaissance des règles qu’ils ont si bien appliquées mettra seule entre tes mains, tu feras rire à tes dépens les artistes en leur fournissant matière à raillerie, comme ce péripatéticien qui fut à bon droit moqué d’Annibal pour avoir péroré avec plus d’éloquence que de discernement sur le fait de la guerre devant ce capitaine.

C’est une mission bien élevée que de révéler au public la belle synthèse harmonieuse d’une œuvre d’art due à l’étude analytique la plus patiente, d’indiquer aux jeunes artistes cet équilibre parfait de l’esprit d’analyse avec l’esprit synthétique, apanage des hommes forts, et de leur apprendre à ramener le particulier au général, opération qui distingue le penseur : car tout fait ramené aux idées générales est un signe par lequel on reconnaît l’homme.

Contempler les réalités, en dégager les grandes lois et se les assimiler, puis, sous l’influence des facultés créatrices, donner la vie aux matériaux, voilà ce qu’il faut apprendre au jeune homme. Nous ouvrons parfois la main que Nature tient fermée