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LEON-BATTISTA ALBERTI.

vieux romans : la Prophétie de Merlin, l’Enfer Saint-Patrice, la Tour-Pilate, le Château d’aimant et la Papesse Jeanne. Alors, on ne voguait sur l’océan sans fond des mathématiques autrement que sur le frêle et piteux radeau du Comput manuel et Calendrier des bergers.

Peut-être, tout d’abord, l’érudition semble-t-elle étouffer l’inspiration ; mais, du passage de la Renaissance à travers cette érudition devait naître la critique, et l’on trouve déjà, dans certaines notes du Vinci, des idées dignes de François Bacon, et des démonstrations qui procèdent de la plus rigoureuse méthode.

Alberti vient au monde pour profiter de cette révolution dans les études. Intelligence grande ouverte, il absorbe toutes les notions du cycle scientifique. À lui peut s’appliquer cette pensée du sage chinois : « L’homme vulgaire a une âme étroite ; elle ne contiendrait pas un atome. Le saint embrasse dans son cœur le ciel et la terre. Il n’y a rien que sa vertu ne contienne ; elle est comme la mer, qui reçoit tous les fleuves[1]. »

Sans doute il fut élevé avec cette douceur relative de la pédagogie italienne, contrastant singulièrement avec la sanglante cruauté de la nôtre, qui

  1. Tao-te-King-KiaH’de Te-thsing, trad. de Stanislas Julien.