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JACK ET JANE.

La petite fille avança si gentiment le fauteuil à bascule auprès du poêle que Mme Grant se laissa tenter.

« Ce n’est pas de refus, dit-elle, car je suis sur pied depuis cinq heures du matin, et je commence à être fatiguée. Mais rangez bien les provisions dans le garde-manger et ne laissez pas la porte ouverte. Surtout n’y laissez pas entrer Minette. »

Mme Grant prit son tricot ; elle ne savait pas rester inoccupée un seul instant. Tom se balança sur sa chaise en se servant d’un brin de paille en guise de cure-dent, Dick se munit d’un petit pot d’huile spéciale d’une nouvelle invention et en enduisit les souliers pour les rendre imperméables. Harry prit son livre de compte d’un air affairé, et M. Grant bourra sa pipe.

Merry, par extraordinaire, s’acquitta consciencieusement de sa tâche. Quand elle revint enfin, tous l’accueillirent avec cette sorte de sympathie muette qu’ils en avaient toujours pour « la petite. » Mais elle alla s’asseoir sur les genoux de son père,

« Eh bien, Merry, je vous écoute, lui dit M. Grant en l’embrassant.

— Je suis sûre que vous allez trouver cela bête, balbutia-t-elle.

— Je ne serais pas étonné qu’il s’agît d’une poupée, dit son père en caressant ses cheveux soyeux.

— Oh ! papa, il y a au moins deux ans que je n’ai touché une poupée ! Non, ce n’est pas cela, mais je voudrais avoir une jolie chambre comme celle que Mme Minot a arrangé pour Jane Peck. Je ferais tout moi-même, et il ne me faudrait pas grand’chose, car je n’ai pas la prétention de la rendre aussi jolie que la sienne. »