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SUR LA COLLINE.

n’était pas jusqu’aux plantes du jardin qui ne parussent pressées de pousser. Tout parlait de travail et d’activité. Merry eut honte de sa nonchalance. Elle quitta son poste d’observation, noua son bonnet et son tablier, et prit son balai en chantant : « Tout travaille ici-bas ; moi je veux travailler aussi. »

En un clin d’œil elle eut balayé les chambres à coucher et l’escalier. Elle arriva à la porte du salon. Cette chambre faisait son désespoir. Elle n’y entrait qu’à contre-cœur et en ressortait le plus vite possible.

C’était, comme la plupart des salons de campagne, une pièce sombre, nue et glaciale, très peu luxueuse et encore moins confortable. Des meubles recouverts de crin étaient alignés le long des murs ; sur la table étaient des livres et des albums qui n’étaient jamais ouverts par personne ; sur la cheminée, des vases en porcelaine à fleurs, des coquillages et une pendule toujours arrêtée. Pour conserver au tapis toute sa fraîcheur, on avait l’habitude de fermer les volets de la chambre six jours sur sept ; aussi elle semblait inhabitée, et tout y avait un air lugubre.

Merry eût bien voulu changer tout cela, mais sa mère faisait la sourde oreille, et la petite fille avait dû abandonner ses rêves de tableaux et d’objets d’art. Elle aérait et nettoyait consciencieusement cette pièce tous les samedis en se disant chaque fois que, si jamais elle avait un salon à elle, elle tâcherait de le rendre moins semblable à un caveau funèbre.

La salle à manger ne ressemblait guère au salon. Là, Merry avait eu le champ libre ; mais ses embellissements avaient eu lieu si graduellement, que personne n’eût pu