— Ne désirez-vous rien d’autre ? demanda Laurie.
— Depuis que j’ai mon piano, je suis parfaitement heureuse ; je désire seulement que nous restions tous ensemble et bien portants.
— J’ai des quantités innombrables de souhaits, mais celui que je préfère est d’aller à Rome, de faire de belles peintures et d’être la plus grande artiste de l’Amérique. »
Ce fut le modeste désir d’Amy.
« Eh mais ! excepté Beth, nous sommes tous passablement ambitieux, dit Laurie qui mordillait un brin d’herbe d’un air très méditatif. Je voudrais savoir si jamais l’un de nous obtiendra ce qu’il désire ?
— Nous avons tous la clef de nos futurs châteaux en Espagne, dit Jo ; reste à savoir si nous saurons ouvrir la porte ou non.
— Si nous vivons encore tous dans dix ans d’ici, il faudra nous réunir pour voir combien d’entre nous auront vu leurs souhaits accomplis.
— Mon Dieu ! que je serai vieille ! vingt-sept ans ! s’écria Meg, qui, venant d’avoir ses seize ans, comptait comme si elle en avait dix-sept et se croyait déjà très âgée.
— Vous aurez vingt-cinq ans, Laurie, et moi vingt-quatre ; Beth vingt-trois et Amy vingt et un. Quelle vénérable société ! dit Jo.
— J’espère que, dans ce temps-là, j’aurai fait quelque chose, moi aussi, dit Laurie ; mais je suis si paresseux que j’ai peur de n’arriver à rien, Jo.
— Mère dit qu’il vous manque un but, et que, lorsque vous l’aurez trouvé, elle est sûre que vous travaillerez parfaitement.
— Est-ce vrai ? je travaillerai donc à le trouver, s’écria Laurie en se levant avec une énergie subite. Ce