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Page:Alcott - Sous les lilas.djvu/39

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« Il a faim ; il faut lui donner à manger, et alors il verra bien qu’on ne veut pas lui faire de mal, » opina Sally qui donna l’exemple en offrant sa dernière tartine.

Bab prit la jolie timbale de fer-blanc peint, dont Mme Moss avait fait cadeau à ses filles peu de jours auparavant, et fit le tour de l’assistance pour recueillir les contributions ; puis elle la montra au chien en l’invitant à s’approcher, mais il n’osa pas dépasser le seuil de la porte. Il se mit debout, il prit un air suppliant et implora leur pitié d’une façon si touchante que Bab, ayant déposé la timbale à la porte, recula jusqu’au fond de la salle d’école en disant avec compassion :

« Il meurt de faim ! il faut le laisser manger tout ce qu’il voudra et ne pas nous en approcher. »

Les enfants se reculèrent en témoignant un intérêt mêlé de pitié ; mais il m’en coûte de dire que leur charité ne fut pas récompensée comme elles s’y attendaient ; aussitôt que le barbet vit la place libre, il s’avança résolument, saisit entre ses dents l’anse de la timbale et s’élança au triple galop sur la route.

Des cris de surprise retentirent ; les plus perçants furent ceux de Bab et de Betty, traîtreusement dépossédées de l’ustensile dont elles étaient si fîères ; mais personne ne put courir après le voleur : car la cloche sonnait, et les enfants reprirent leurs places non sans quelque désordre.

À la fin de la classe, les deux sœurs se hâtèrent de rentrer pour raconter à leur mère leur mécompte et chercher près d’elle des consolations dont elle se montra prodigue.